Tous précoces, tous hyperactifs, vraiment ?

 

Bon, soyons clair, c’est l’épidémie… précoces et hyperactifs nous envahissent et c’est le règne des petites terreurs…

Ou s’agirait-il d’une épidémie de boucs émissaires ?

L’école, pour répondre aux besoins, s’est industrialisée, les directives viennent d’en haut et les enseignants doivent appliquer, les élèves ingurgiter puis régurgiter le même repas indigeste. À l’ère du MacDonald, les enseignants ont un programme, des directives, des contraintes en terme d’évaluation, de méthode; pas de flexibilité, ce serait trop demander.

Si vous me demandez quelle image me vient en tête lorsque l’on me demande comment serait l’école idéale, c’est celle de l’école de la série télévisée « la petite maison dans la prairie » : tous les âges y sont représentés, les grands aident les petits, les élèves ne prennent pas de notes pendant des heures, en sortant de classe ils sont au grand air… Mais si vous me demandez quel souvenir j’ai de mon école, c’est celle où les enseignantes se moquaient de Nicolas T car il était pataud et bousculait tables et chaises (il était grand et large aussi pour son âge), un jour il avait été attaché à sa chaise, je me souviens aussi de 2-3 élèves à qui l’on avait scotché la bouche à quelques occasions…

Mais cela n’arrive plus aujourd’hui, car lorsque l’enfant ne se conforme pas aux attentes, lorsqu’il remue, lorsqu’il n’est pas concentré sur la tâche jusqu’au bout, c’est qu’il a un problème. C’est plus (in)humain (à vous de décider), plus facile en quelque sorte, surtout cela a le mérite de ne pas remettre en cause le système.

Le problème, dans notre beau pays, c’est que les enseignants ne sont pas formés aux troubles des apprentissages, aux troubles de l’attention ni aux neurosciences. Nombreux sont les enseignants, dont je vois les enfants, qui me rapportent avoir des propositions de formations inadaptées par rapport à leurs attentes. La conséquence principale de ce manque de formation est qu’ils connaissent principalement, grâce ou à cause de l’intérêt médiatique qu’ils suscitent, ce que l’on appelle les précoces d’une part et les hyperactifs d’autre part.

C’est bien connu, l’enfant qui s’ennuie parce qu’il est plus intelligent que la moyenne fait des bêtises en classe. De tout temps les gens intelligents ont été décrits comme ayant des problèmes de comportement, enquiquinant leurs enseignants et leurs camarades pour tromper leur ennui, perturbant l’ordre établi. Vraiment ?

Les hyperactifs, eux, ne sont jamais concentré, escaladent tout et tout le temps et sont agressifs, de toute façon ils ne sont pas fait pour l’école et tout cela finira mal.

Vraiment ?

À la sortie des écoles, aujourd’hui, on ne parle que de ça, untel est précoce, untel est hyperactif, un diagnostic a été posé, tout le monde est sauvé, l’école n’a pas de questions à se poser... Mon discours vous paraît cynique, certes, car pour fréquenter ces soit-disant trublions depuis des années, je peux vous dire une chose : ils ne sont pas inadaptés.

Non, le haut potentiel ne prédispose pas à une moins bonne réussite scolaire ou à des troubles du comportement comme un rapport circulant au sein de l’Éducation Nationale a voulu nous le faire croire (rapport datant de 2002). D’ailleurs, être haut potentiel n’est pas un trouble, rappelons-le.

Non, avoir du mal, à se concentrer ne prédispose pas les élèves à l’échec scolaire, ce qui fait la gravité des troubles de l’attention c’est la présence de trouble des apprentissages (troubles dys) ou l’absence d’aménagements scolaires lorsqu’ils sont nécessaires.

Je tiens à saluer le courage de certains enseignants qui aménagent et font de l’individuel, sortent du cadre et innovent chaque jour.

Je souhaite à ceux qui attendent d’être formé, que le régime (!) s’assouplisse, qu’on leur apprenne de nouvelles méthodes d’enseignement, que l’aide urgente arrive enfin.

À ceux qui sont dépassés par la vague de jeunes de moins en moins concentré (non, ils ne sont pas tous TDA), par la lourdeur administrative, la rigidité du système, de trouver un petit coin de ciel bleu.

À ceux qui vénèrent le stylo plume et qui pensent savoir mieux que tout le monde (parents, médecins, orthophonistes, psychomotriciens…), bref qui s’accrochent au XIXè siècle, de prendre la poudre d’escampette car ils vont avoir de plus en plus de mal, eux sont clairement inadaptés…

Et à ceux qui entendent qu’ils ne sont pas normaux ou pas adaptés au système scolaire, je dis que personne n’est normal et qu’un système scolaire qui a des décennies de retard fabrique des générations désenchantées et démotivées.